La décision de l’ARCEP portant modification du plan de numérotation des appels téléphoniques, afin notamment de protéger les consommateurs, concerne toutes les entreprises utilisant des systèmes automatisés de relance. Parmi elles, les spécialistes du recouvrement de créances représentés au sein de la FIGEC, qui demande que soit faite une distinction entre consommateurs… et mauvais payeurs.
L’ARCEP (Autorité de Régulation des Communications Électroniques et des Postes) a publié cet été sa décision n°2019-0954 modifiant le plan de numérotation des appels téléphoniques. Elle intervient après deux ans de consultations des différents acteurs du secteur, sur des sujets aussi divers que l’attribution et la conservation des numéros selon les zones géographiques de la domiciliation de l’abonné, ou la protection du consommateur face au harcèlement téléphonique et aux appels frauduleux.
Ce dernier point est sensible, car les mesures prises ces dernières années n’ont pas porté leurs fruits. Ainsi, le système de blocage Bloctel -inscription du consommateur sur une liste « rouge » censée lui éviter des appels non sollicités- est régulièrement critiqué dans la presse pour son inefficacité.
Dans une louable intention de mieux protéger les abonnés du téléphone contre le démarchage intempestif, l’ARCEP a donc prononcé :
- A compter du 1er août 2019, l’interdiction pour les appels ou messages non automatisés provenant de l’international, d’utiliser comme identifiant d’appelant, en l’absence de mécanisme d’authentification, un numéro géographique (01-05) ou polyvalent (09).
- L’interdiction sera étendue au 1er janvier 2021 aux systèmes automatisés. Ceux-ci se caractérisent par le fait qu’ils émettent plus d’appels qu’ils n’en reçoivent.
- Enfin, l’utilisation des numéros mobiles (06-07) est également proscrite, pour tous les systèmes, à compter du premier août 2019.
La logique du régulateur est la suivante : imposer soit une authentification de l’appelant, par des moyens technologiques qui restent à développer et dont la mise en œuvre dépendra des opérateurs téléphoniques, soit l’usage d’un numéro de téléphone commençant par 08, ce qui facilitera le « filtrage » par l’abonné qui pourra identifier ainsi plus facilement les importuns que lorsque ces derniers se « cachent » derrière des préfixes en 01-05, en 06-07 ou en 09.
Difficile de ne pas applaudir à cet objectif, quand on sait que des milliards (127 !) de numéros de téléphone ont été effacés dans des fichiers de sociétés de démarchage qui ne détenaient pas d’autorisation pour les utiliser (optin client). Et encore ce chiffre ne concerne-t-il que les entreprises de bonne foi, travaillant en concertation avec les autorités, ce qui n’est pas le cas de toutes les sociétés, dont beaucoup opèrent depuis l’étranger, hors d’atteinte de la loi.
La FIGEC a cependant souhaité évoquer la problématique très particulière des sociétés de recouvrement et de médiation financière, dont l’efficacité repose, entre autres procédés, sur l’usage de ces systèmes automatisés d’appels téléphoniques (le numéro de l’abonné étant fourni par le créancier). Une obligation de s’identifier ou une obligation d’utiliser un préfixe en 08 similaire à celui utilisé par les démarcheurs téléphoniques, nuirait grandement à cette efficacité, l’abonné pouvant alors aisément choisir de ne pas répondre à l’appel.
La FIGEC souhaite que soit établie une vraie différence entre consommateurs et mauvais payeurs. La protection du premier est une nécessité, mais elle ne doit pas conduire à aider le second à se soustraire à ses obligations de paiement.
Elle a donc écrit à l’ARCEP pour lui rappeler le coût pour la compétitivité des entreprises des retards et des défauts de paiement :
- Ils occasionnent 25 % des défaillances d’entreprises chaque année
- Ils menacent 300 000 emplois
Au total, 56 milliards de créances impayées grèvent chaque année la compétitivité de nos entreprises, un chiffre à rapprocher du PIB de la France (3 353 milliards en 2018).
Qui veut prendre le risque de voir ce ratio augmenter en gênant le travail des sociétés de recouvrement ? Personne sans doute, et c’est pourquoi la FIGEC a demandé que ses adhérents, entreprises concernées, bénéficient d’une dérogation pour pouvoir continuer à utiliser sans restriction les numéros visés par la récente interdiction. Une autre façon de militer activement pour le consommateur (qui n’est pas un mauvais payeur !) en renforçant la compétitivité de ses fournisseurs, donc celle des tarifs qu’ils peuvent lui proposer !
La position de la FIGEC est à retrouver en cliquant ici